25/05/2017

mai 25, 2017 0

Docteur Sleep - Stephen King



[Mon premier roman publié en 1998 par Scribner était Bag of Bones (Sac d’os, Albin Michel). Soucieux de faire plaisir à mon nouvel éditeur, j’étais parti en tournée promotionnelle. Lors d’une séance de signatures, un lecteur m’a lancé : « Hé, vous avez une idée de ce qu’est devenu le gosse de Shining ? » - Note de l'auteur]

Il y a quelques années, c’est très exactement la question que je me suis posée avant de découvrir qu’une suite était en cours de parution. Puis, j’ai mis de côté ma curiosité. Ma PAL étant ce qu’elle est -  assez hétéroclite et bordélique en somme - j’ai remisé Docteur Sleep aux oubliettes même si savoir ce que devenait Danny me revenait de temps en temps avec ce  fameux « Ha… Je me relirai bien un Stephen King ! ». Pour le souvenir, la nostalgie. 

Faut dire que l’ai découvert également à l’adolescence à cause des copines de classe qui ne juraient que par lui, en plus d'un tas d'adaptations TV. Ce qui m’amena donc à lire en partie quelques unes de ses œuvres parmi les plus connues, (Shinning, Simetierre dont je garde un souvenir plus flou et mitigé et forcément, Carrie). 


Peut-être même ce légendaire enfant intérieur auquel les gourous New Age faisaient tout le temps référence. Dan était plus ou moins convaincu que cette histoire d’enfant intérieur n’était bien souvent qu’un stratagème pour excuser quantité de comportements égoïstes et destructeurs (ce que Casey aimait appeler le syndrome du je-veux-tout-tout-de-suite), mais il était aussi convaincu que les adultes, hommes et femmes confondus, abritent quelque part dans leur cerveau tous les stades de leur développement – pas juste l’enfant intérieur, mais le nouveau-né intérieur, l’adolescent intérieur, le jeune adulte intérieur.


Ici, rien de terrifiant. L’histoire est bateau et convenue, point de frisson ni de surprise. L’intrigue ressemble à beaucoup d’autres avec des méchants simplets et caricaturaux par rapport à tout ce qu’on trouve déjà en young adult ou thriller fantastique notamment, mais dont la quête tisse le lien avec les différentes thématiques abordées. L’intrigue n’est donc que prétexte et au final, secondaire.

La mort en elle-même est partie prenante, entre Dan qui devient un passeur et ces « vilains vampires » chercheurs d’immortalité. Ceux-là même ne donnant pourtant aucun sens à cette existence étendue,  creuse et vide en somme hormis dans cette quête effrénée d’une cure de jouvence en semant des victimes depuis des éons. Ils courent après la vie quand lui-même a accepté qu’elle se respire ici et maintenant puisque la mort va de soi.


Et dans cette trame entre vie et mort, il y a la toile familiale intergénérationnelle – et le conflit entre générations - et ce qu’elles conditionnent. Notamment casser les schémas répétitifs par la recherche d’un équilibre malgré les réminiscences, tout en réconciliant l'enfant qui fut et l'adulte qui est par une meilleure compréhension du passé et de son acceptation pour enfin devenir soi en cicatrisant peu-à-peu les blessures subsistant à l’intérieur. 

Il y a également les personnages clef intervenant dans l'évolution de Dan qui échoue et s’ébroue tout d’abord, avant d’avoir la volonté de devenir meilleur. Il apprendra à lâcher du leste, à se mettre face à ses contradictions et responsabilités. Il apprendra à faire confiance en acceptant les mains tendues comme de se libérer et de parler, tout autant à émerger enfin des carcans dans lesquels il s’était toujours enfermé via une fuite en avant. Qu’elle soit dans l’alcool ou dans ces interminables voyages avant l’arrivée à bon port. Puis, il y a celle qui sera sa porteuse de lumière et s’incrustera par petites touches dans sa vie avant que les fils se nouent, inextricables.

Les chapitres sont courts et l’écriture assez fluide. Pas un coup de cœur, mais un bon moment de lecture sur des thèmes qui me sont familiers. Si « Shining » évoquait la déchéance, « Docteur Sleep » aborde l’inverse. Le fait de s’en sortir, une forme de rédemption. On sent  donc un auteur assagi, plus posé. 

En finalité, ce roman laisse le sentiment d’un début de plénitude en se montrant lumineux et positif. Rien d’inoubliable cependant, même si ce fut un plaisir de constater la transition de Danny enfant à Dan l’adulte ainsi que son cheminement en tant que tel, par extension celui de l’auteur.


18/05/2017

mai 18, 2017 0

La nuit des cannibales - Gabriel Katz

La nuit des cannibales - Gabriel Kats chez Pygmalion - 374 pages



Si je trouvais la couverture assez "lambda" et donc guère attrayante, c'est le synopsis qui aura attiré mon regard ainsi que le nom de l'auteur. En effet, j'entends parler de Gabriel Katz à tout va depuis la publication d'Aeternia que beaucoup ont apprécié. Ici, point de fantasy. Un brin de fantastique cependant pour un thriller qui promet quelques heures dépaysantes dans Paris et alentours avec un personnage aussi drôle que détestable, ainsi que des portraits truculents de Madame et Monsieur Tout le monde.


Si à quarante balais passés, vous vous retrouviez au petit matin, soudainement dans le corps d'un lycéen de quinze ans... Que feriez-vous ?


— C’est sympa, les garçons, d’avoir souhaité bonne chance à Alex pour son concours. Non, vraiment, c’est sympa, j’apprécie. Il démarre sans attendre de réponse, et met la radio – Nostalgie – pendant que je me retourne vers mon frère. Je viens d’apprendre qu’il n’est pas Alex. Et lui aussi, il vient de l’apprendre.


Imaginez-vous dans un scénario a la Freaky Friday mâtiné d’une forme de vampirisme nouveau genre calquée sur certaines croyances spirituelles avec un côté Highlander et film d’action, mélangez-bien et vous obtenez « La nuit des cannibales ». Oui, on a les références pourries qu’on a et je n’en manque pas. Même si ce ne sont pas les seules à y caser. Cela m’a fait également pensé à certains jeux de rôle comme « Mantra » ou  « Nephilim » pour les réminiscences… Et forcément, à Vampire Mascarade.

Premier livre de cet auteur pour moi, bien que beaucoup évoquent Aeternia depuis un moment déjà… J’ai été happée dès le début. Certes, l’écriture est simple et efficace, mais heureusement que ma lecture s’est faite hors lieux publics parce que c’est sacrément drôle et grinçant. Et quand c'est drôle, moi je ris...


Attention, légers spoilers !!!


Si certains éléments n’ont pas été approfondis, c’est parce qu’il faut se tourner vers la spiritualité et un brin de numérologie. Le chiffre 7 y a toute son importance. Toutefois, l’absence d’information concernant ce que deviennent "ceux dont les corps sont investis" manque cruellement.

Nous avons cependant un antihéros, antipathique au possible, aigri et désabusé, trouvant tout « moche », des bâtiments parisiens aux gens croisés ici et là, assez imbu de sa personne et ne se remettant jamais en question. Au final, la partie sombre l'emporte et il se déshumanise au fur et à mesure qu’il s’installe dans sa nouvelle vie. L’ancienne laisse clairement supposer qu’il était coincé dans une existence sans vraiment de frissons. Une existence pleine de mensonges confortables jusqu'au nom à particule. La nouvelle, au vu des dangers encourus, l'amène à se dépasser jusqu'à foncièrement ne pas soigner son karma, à ne plus avoir peur de rien, au risque de se prendre pour Dieu en choisissant qui doit vivre et mourir, à en imposer sa propre loi tout en se moquant du clan, des limites pour mieux s'encenser ou se faire encenser. La fin ne fut pas surprenante et terriblement convenue. On la sent venir de loin vu les changements relationnels qui s'opèrent... Et la conclusion, convenue comme je disais, reste néanmoins amusante.

Je me suis demandée, en transposant, si cela ne renvoyait justement pas à la crise de la quarantaine. Et si tout était à refaire : Serait-on les mêmes ? Referait-on exactement le même parcours ? Le personnage de Marie renvoie très exactement à ce type de questionnements par ailleurs. 

En attendant, ce fut une lecture divertissante bourrée d'humour. Gabriel Katz, lors d'une interview, avait évoqué le fait que s'il devait se laisser influencer, écrirait des histoires où ça tire dans tous les sens... Probable qu'il se soit donc lâché en nous offrant celle-ci dans un page-turner sans temps mort tout en se faisant clairement plaisir.

17/05/2017

mai 17, 2017 0

Lire c'est partir : L'association faiseuse de miracles


Si les enfants ne vont pas vers les livres... Alors les livres iront à eux ! C'est fort de ce constat que Vincent Safrat ayant pourtant boudé l'école, mais ayant découvert le pouvoir magique des classiques, a su se poser une pertinente question. Pourquoi envoyer les invendus au pilon ? Pourquoi ne pas les récolter et les offrir aux plus démunis ? 

 


C'est ainsi que dans les années 90, il toqua aux portes des éditeurs en expliquant son projet.  Certains répondirent présents, d'autres pas. Ce fut donc le début d'un long périple semé d'embûches puisque ces mêmes éditeurs fermèrent leurs portes à l'homme de bonne volonté par la suite. Et pour cause, c'est la monnaie qui dirige le monde... 


Qu'à cela ne tienne, après avoir égrené les quartiers pauvres d'une des banlieues parisiennes (91 me semble), et fait imprimer des "petits livres" comportant notamment des classiques libres de droit, il se décide à ouvrir sa propre maison d'édition. Ainsi naquit "Lire c'est Partir" en tant qu'éditeur à partir de 1998. Un éditeur qui propose essentiellement des livres pour enfants à moins du symbolique euro, prix coûtant. Comme quoi, les quelques petits sous au fond des poches des marmots ne servent pas qu'à acheter des bombecs !


Des livres qu'il vend donc, lui et ceux qui l'ont rejoint, en arpentant les cours d'école jusqu'à, aujourd'hui... Recevoir trop de manuscrits ! En plus de faire des bénéfices... Dont l'homme s'étonna d'abord pour finalement aller plus loin dans sa démarche et monter d'autres projets, dont des activités comme le théâtre sur des lieux annexes au milieu scolaire.


"Récupérer puis distribuer et maintenant éditer puis vendre à 0.80€, voilà le quotidien de Vincent Safrat."


Au fil des décennies - déjà vingt-ans ! - l'association a pris de l'ampleur et sillonne les routes avec plusieurs camions. Différents dépôts émaillent notre hexagone, destinés essentiellement aux instit' souhaitant des ouvrages à bas coût. Livres, mais aussi CD.

Étrangement, je me posais justement la question du pilon et du gâchis que cela pouvait représenter quand tant de personnes peinent à s'acheter des bouquins, voire même pour lutter contre l'illettrisme. Même les bibliothèques et médiathèques jettent des livres si non revendus, et c'est bien triste tant ces derniers pourraient avoir d'autres vies.

Certes, aujourd'hui, il y a les ouvrages imprimés à la demande et autres ebooks, mais tout le monde ne dispose pas forcément encore de liseuse ou de téléphones aux écrans assez larges. Par ailleurs, cela devrait plutôt servir au sein de bibliothèques de rue comme celles organisées par ATD Quart Monde.

En bref, c'est une initiative louable de la part d'un homme qui a appris à aimer les livres et tente de partager sa passion à sa façon. Lire, c'est voyager et s'évader. Lire, c'est une fenêtre ouverte sur le monde, la base de toute connaissance permettant également de se forger un esprit critique...  Et cela, il le transmet parfaitement.

En attendant, pour découvrir l'association et acheter ses publication afin de faire plaisir à vos petits bouts, c'est par ici : https://www.lirecestpartir.fr/


13/05/2017

mai 13, 2017 0

Heure Lumière - Cookie Monster de Vernor Vinge



Non, vraiment, la vie de Dixie Mae n’a pas toujours été rose… Mais grâce à LotsaTech, et au boulot qu’elle vient de décrocher au service clients de ce géant high-tech, les choses vont changer. Telle était du moins sa conviction jusqu’à ce que lui parvienne l’email d’un mystérieux expéditeur, message qui contient quantité de détails intimes liés à son enfance et connus d’elle seule… Dixie Mae, telle Alice, devra passer de l’autre côté du miroir et payer le prix de la vérité — exorbitant : celui de la nature ultime de la réalité au sein de la Silicon Valley…


***


Dès le titre et le synopsis, nous avons bel et bien une petite idée de ce dont il sera question. Non, il ne s’agit pas d’une attaque de gigantesques et monstrueux cookies au chocolat…  Cela aurait pourtant pu me causer une grosse fringale et avec un bon thé chaud...  Comme la marionnette bleue du Muppets show qui a toujours faim, performing by Frank Oz. Oui, comme la référence au pays d’Oz dans ladite nouvelle après celle d'Alice au pays des merveilles… (Je suis en forme, moi...). Allez, c'est cadeau :


Non, ce n'est pas lui le cookie monster de l'histoire...

En attendant, clin d’œil ou pas... Comme Dixie-Mae, nous découvrons une entreprise ayant supplanté les plus connues. La nouvelle recrue est heureuse de pouvoir enfin changer sa vie, elle qui a l’impression d’avoir tout gâché à maintes reprises, espérant pourtant rendre fier son paternel. Une formation d’une semaine et la voilà donc au service client. 

Et le service client, ça me connait aussi pour en avoir fait pas mal. Or, on sait tous que la majorité des problèmes est entre l’utilisateur et le clavier – pardon, le mode d’emploi de ce qu’il achète ou la non lecture des conditions de vente etc.

Malheureusement, une requête étrange parvient sur l’email dudit service client - l’adresse est généraliste permettant ainsi à tout chargé d’y répondre, sauf qu’elle a été réceptionnée par Victor. Et Victor, c'est le casse-pied du service un peu lourdingue comme votre voisin de bureau en somme. Or, le message contient des informations que seule notre héroïne peut connaitre. De là, entêtée qu’elle est, une enquête démarre menant tout d’abord le lecteur vers certaines suppositions avant que théories et conclusions fusent...

« Oui… cela dit, il y a quelque chose. En fait, le bruit a couru ce printemps que Gerry avait réussi à accroître la cohérence de la caféine dans le modèle de Gershenfeld. »


Je ne sais pas vous, mais ça m’a fait rire. La cohérence de la caféine… Et c’est là aussi le piège taquin de l’auteur à nous embrigader dans des explications scientifiques (ou pseudo-scientifiques parfois du coup ?), relevant surtout de références éparses autour du quantique et bien-sûr d’informatique à coup d’algorithmes avec un mix de patronymes n’ayant pas toujours la même thématique/le même domaine. Parfois même, m'a-t-il semblé à tort ou raison, pas une vision commune ou même opinion des sujets abordés par les protagonistes cités. Il me faudrait approfondir mes recherches googloutantes pour en être certaine, mais hé...

Du coup, il y a probablement un certain nombre de jokes que seuls les connaisseurs sauront détecter.  Pas mal de références en livres SF (David Brin notamment) – dont certaines existent, d’autres pas - ont été également glissées et sur lesquelles je jetterai très certainement un œil ou deux.  

Hard-SF pourtant très accessible grâce au personnage principal. Une immersion façon Black Mirror.


C’est vraiment la force de ce court roman que de nous immerger directement au cœur de l’intrigue avec cette fameuse "première journée" afin de poser des personnages, au demeurant fort bien campés. 

L’impression d’un épisode de Black Mirror sous format livre qui eût par ailleurs un effet jubilatoire sur ma petite personne. Bien entendu, « au-delà du réel »,  et autres séries de cet acabit, me rappelant également les « heures lumières » nostalgiques de mon adolescence aux quatre coins de l’univers, à fricoter avec les bonnes vieilles anthologies de SF qui passaient aussi bien que de bons cook… Oui, bon j’arrête. Puis, elles étaient faciles celles-là !

Un agréable moment de lecture malgré une fin ouverte quelque peu frustrante. Sans doute en écho à l’état de l’héroïne dans les dernières lignes... ? Certes oui, des indices jalonnent les dernières pages et on comprend d'autant plus de quoi il en retourne, s’agissant surtout d’un roman s’interrogeant sur la singularité technologique, le transhumanisme et l'éthique. 

Singularité technologique que l’auteur semble d’ailleurs avoir à cœur au sein de sa bibliographie.


Encore une fois, ce fut une jolie découverte par un éditeur dont j’apprécie les publications et notamment cette collection qu’il me tarde de poursuivre - ayant déjà lu "L'homme qui mit fin à l'histoire" de Ken Liu dont il me faudra ajouter la critique sur le blog également...

Du coup, vous reprendrez bien un cookie ?

11/05/2017

mai 11, 2017 0

Œuvres classiques : Le portrait de Dorian Gray - Oscar Wilde




Ha Dorian Gray qui scandalisa l'Angleterre victorienne si bien pensante ! 



Tant de réinterprétations et d'adaptations aujourd'hui où la tendance est de toujours réunir différents personnages emblématiques de romans de cette époque, avec ce soupçon de brumes gothiques et de parfums presque romantiques, en omettant volontairement certaines morales ou philosophies pourtant bien présentes dans ces ouvrages-là.


Croit-on que Sire Wilde est démodé ? Non. Rétrospective au Petit Palais et MOOC sur l'auteur en 2016 qui fut certainement son année à titre posthume. Alors révisons nos classiques ! Année durant laquelle même Grasset a publié la version non censurée dudit ouvrage qu'il me tarde de redécouvrir sous - peut-être - un nouveau jour ?


Lui aussi m'a accompagné, il y a fort longtemps. J'ai jubilé face à cette écriture ciselée et l'ouvrage m'a marqué, utilisé souvent en référence dans mes activités de rôliste. Ce chef d'oeuvre sous forme de conte philosophique, que j'emporterai aisément sur une île déserte, pose plusieurs questions dont et avec cynisme. Sur l'art et la conscience. Après tout, peut-on vivre sans conscience ? Peut-on nier l'effet de nos mauvaises actions sur l'âme ? Peut-on vivre de manière abstraite à l'image d'une oeuvre d'art en fermant les yeux ? Peut-on enfin se mentir à soi-même ? Rédemption et repentir sont-ils possibles ?


Dorian Gray, si beau et si pur, encore jeune et malléable fait un vœu qui s'exauce et se laisse séduire par la facilité et le mal. Lui, entre deux feux, l'artiste et le tentateur, s'avilira jusqu'à s'égarer sans doute bien trop loin, jusqu'à l'acte final, l'ultime châtiment qu'il s'infligera à lui-même. A moins que ce ne fut qu'un juste retour dans l'ordre naturel des choses après l'avoir tant transgressé, à rebours ?

06/05/2017

mai 06, 2017 0

Sense8 saison 2 : Profondément humain !

Depuis le 5 mai dernier, Netflix diffuse enfin la seconde saison de Sense 8 ! 









Pourtant,  j’ai mis plusieurs mois avant d’accrocher aux débuts de la série jusqu’au coup de foudre. Pour quelles raisons ? L'introduction est particulièrement lente pour installer l’intrigue principale tout en présentant les huit sensitifs. Sans doute également parce qu’il faut parfois le bon mood pour entrer dans une histoire. Néanmoins, j’attendais la suite avec impatience depuis deux années.

Il faut dire que cette seconde saison a mis du temps à se concrétiser. Notamment suite à un désaccord avec l’acteur Aml Ameen qui jouait Caphéus, désormais remplacé par Toby Onwumere. Ce dernier joue un Caphéus d’autant plus sérieux et empathique, mais il faut avouer que je m’étais accoutumée au premier visage qui avait « le truc en plus » pour ce personnage. Par ailleurs, j’imagine que la multiplication des lieux de tournage sur tous les continents a dû impacter les délais.

Sense 8, c’est une série abordant la connexion de huit personnes vivant à chaque coin du globe. Une connexion non choisie  qui leur permet de se voir, de se parler, d’utiliser leurs compétences pour aider un des leurs en cas de pépin sans pour autant être présents physiquement.  Bien entendu, tout ceci n’existerait pas sans une intrigue et des antagonistes cherchant à leur nuire. Complot, recherche scientifique, détournement du « don » probablement à des fins militaires… Auxquels s’ajoutent les difficultés personnelles.

Toutefois, cette série n’est pas que cela. Si l’intrigue principale est cousue de fil blanc pour qui a l’habitude de lire de la science-fiction, ce n’est pas ce qui a retenu mon attention.


Malgré le manque de subtilité, Sense8 est avant tout une ode à l’humanité dans sa globalité. 



Manifestation religieuse en Inde


Si la première saison était plus lente, la seconde a enfoncé l'accélérateur en se jouant des codes revisités jusqu'aux gros clins d’œil, de l'humour et beaucoup de dérision... Parfois à la limite de la parodie – voire complètement dedans - dont des grosses ficelles scénaristiques et facilités. Pour ces deux derniers points, il me semble très clair que ce soit fait exprès.

Sous couvert d’intrigues : C'est l'humain tant dans le collectif que l'individualité qui est mis en avant dès le générique. Dans ses points communs et différences, dans sa complexité, sa complémentarité, le fait d’être capable du pire comme du meilleur. N’oublions pas le droit à la différence, l'acceptation de soi et des autres au sein d'un monde pluriculturel et trop souvent intolérant, voire sur le point d'imploser face aux dérives religieuses ou la pauvreté. Le droit à l’épanouissement, à pardonner, à vouloir un monde meilleur et d'avoir le courage de se battre pour ses convictions… En dépit de discours souvent très clichés. Pour y faire écho néanmoins, le passage concernant la communication verbale. Serait-il plus facile de communiquer par empathie et télépathie quand les mots ne sont jamais justes pour exprimer avec exactitude ressentis et émotions ? En effet, toute communication verbale sera déformée à l’écoute.  Le fameux :


"Entre ce que je pense, ce que je veux dire, ce que je crois dire, ce que je dis, ce que vous voulez entendre, ce que vous entendez, ce que vous croyez en comprendre, ce que vous voulez comprendre, et ce que vous comprenez, il y a au moins neuf possibilités de ne pas se comprendre." 

[B. Werber]


Nous avons effectivement chacun notre propre prisme. L’ego. Or, ce dernier est plein de défauts en vérité. Qu’il soit petit, surdimensionné, blessé… Toutefois, la série se veut presque tout public et vu l’état de notre monde actuel, il y a encore un sacré boulot à faire. Discours clichés certes, mais n'est-il pas plus mal d'en rajouter des couches au final ?

Le tout avec un cercle trop idéaliste et utopiste s’accrochant en dépit du reste et souvent le cul entre deux chaises, mais qui décide de se battre. A l’inverse d'autres "sensitifs", qu'on découvrira en cours de route qui soit se cachent, soit fonctionnent en réseau secret. Qui a parlé de Résistance ?



De nouveaux alliés ?


Au final, les personnages principaux représentent des éveillés confrontés à la face sombre de notre monde sans possibilité de fermer les yeux… Là, on entre dans le domaine de la spiritualité. Et attention à ne pas confondre ce terme avec une quelconque religion. La spiritualité évoque cette interconnexion entre le vivant. Entre humains d’abord, voire animaux et végétaux ensuite. Enfin, avec l'univers par un transit d’énergies vibratoires et d’intentions… Ceci dans un but d’évolution et d’amélioration de soi puis du reste, par une meilleure compréhension de ce qui nous entoure. 

Si l’on escompte que la glande pinéale aurait une grande part sur tout ceci et qu’il existe des théories du complot à ce propos – notamment la calcification/l’encrassage avec du fluor dès l’enfance etc. - on retrouve ces éléments, différemment amenés certes, par le biais des "homo sensorium" (espèce inventée), au sein même de la série. Pas que, vu la chirurgie qui y est explicite.

Avoir l’esprit ouvert ou ouvrir son esprit aux possibles est bien au cœur des thématiques proposées. L’éveil des consciences, en somme ?

Le titre « Sense 8 » prend dès lors tout son sens. La boucle est bouclée avec ce symbole maintes fois repris. 

En attendant, malgré un ralentissement en mi saison pour explorer les problèmes individuels, en plus de ceux rencontrés par le groupe… L’accent a été mis sur moult rebondissements. Les personnages font d’énormes pas, grandissent, s’affirment, s’entraident pour pouvoir enfin véritablement avancer ensemble. Malgré un dosage qui laisse parfois à désirer, trop d'actions d’un coup ou pas assez, on se surprend à enchaîner les épisodes sans décrocher ni sa mâchoire ni son attention.